François à la rencontre des autochtones du Canada?

L’année 2017 sera particulièrement effervescente pour le Québec et le Canada : la grande métropole québécoise, Montréal, fête son 375e anniversaire de fondation, alors que la confédération canadienne célèbre ses 150 ans d’existence.

En raison de son héritage manifestement catholique, l’actuel maire de Montréal, Denis Coderre, a fait des pieds et des mains en 2015 pour inviter le pape François à venir fêter le 375e. Il s’est même rendu à l’une de ses audiences générales pour lui en faire la demande expresse. En vain. Si l’évêque de Rome a décliné l’offre, tout porte à croire que c’est plutôt la cause des autochtones qui l’amènerait au Canada en 2018-2019.

En effet, les évêques de l’Ouest canadien, en visite ad limina à Rome ces jours-ci, se sont entretenus pendant deux heures et demie cette semaine avec le Saint-Père. Durant cette rencontre, ils ont notamment évoqué le possible passage de ce dernier en Saskatchewan, où il offrirait ses excuses aux nations autochtones du Canada, démarche recommandée par la Commission de vérité et réconciliation en 2013 et, depuis, espérée par les communautés des Premières nation.

Génocide culturel

Soumis à une politique fédérale d’assimilation depuis 1876, environ 150 000 enfants autochtones ou métis ont été envoyés de force dans des pensionnats, pour être « rééduqués » selon la culture occidentale. Ces institutions, gérées par les différentes églises chrétiennes du pays et financées par le gouvernement fédéral, ont fermé définitivement leurs portes en 1996.

En 2013, la Commission de vérité et réconciliation – découlant de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1991 à 1996 – a libéré la parole d’environ 7000 victimes abusées (sexuellement, physiquement, psychologiquement) par des responsables et des intervenants de ces pensionnats.

Ayant qualifié ces établissements d’outils centraux d’un « génocide culturel », le rapport de cette commission a recommandé, d’une part, que les représentants des églises chrétiennes demandent pardon et que, d’autre part, le pape lui-même se présente en sol canadien afin d’offrir ses excuses pour les torts commis.

Célébrer en vérité

Ces temps de commémorations seront, comme le mot l’indique, l’occasion de faire mémoire des siècles qui ont forgé le pays. La grande ville de Montréal, autrefois appelée Ville-Marie, était un pôle crucial de développement au début de la colonie (17e siècle). À l’instar de la ville de Québec, 250 km plus à l’est sur les rives du Saint-Laurent, Montréal s’inscrit dans cette « épopée mystique » durant laquelle plusieurs catholiques ont quitté l’Europe pour venir fonder ce qu’ils ont vu en songe.

Qui plus est, l’histoire et la culture québécoise et canadienne sont intimement liées à celles des nations autochtones : la province de Québec, dont le nom provient de la langue algonquine [Kébec], porte en son sein une dizaine de communautés ethniquement différentes et qui se divisent en une quarantaine de villages, ou réserves, sur le territoire.

Comme l’ont rappelé les évêques du Canada le 14 septembre 1992, soulignant ainsi le 500e anniversaire de l’évangélisation des Amériques: « Si l’interaction des Amériques et de l’Europe s’est inscrite sous le signe de l’enthousiasme, de l’exploration et du progrès, il faut bien reconnaître qu’elle a aussi comporté une part tragique d’intolérance, d’exploitation et de cruauté. »

Voie de réconciliation ?

La cause des peuples autochtones résonne particulièrement fort depuis plusieurs années, et ce, partout au Canada. Des terres ancestrales violées par les visées de l’industrie pétrolière dans l’Ouest du pays au centaines de disparitions de femmes autochtones, dans l’impunité complète, on pourrait penser que l’histoire ne fait que se répéter.

Pourtant, il semble que les habitants du territoire de Kahnawake, où se trouvent les restes de sainte Kateri Tekakwitha, première sainte autochtone d’Amérique du Nord, soient témoins d’un véritable miracle d’unité depuis sa canonisation en 2012.

Espérons que la visite du pape au Canada, encore incertaine, écrive les premières lignes d’une nouvelle page – plus lumineuse que les précédentes – dans l’histoire de la relation entre les autochtones et les Canadiens.

James Langlois

James Langlois est diplômé en sciences de l’éducation et a aussi étudié la philosophie et la théologie. Curieux et autodidacte, chroniqueur infatigable pour les balados du Verbe médias depuis son arrivée en 2016, il se consacre aussi de plus en plus aux grands reportages pour les pages de nos magazines.